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"Un profil pour deux", le dernier film de Pierre Richard tourné en Brabant wallon.



Durant une semaine à La Hulpe nous avons eu droit au grand Pierre Richard pour sa dernière comédie, "Un profil pour deux".

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synopsis

Pierre, veuf et retraité, ne sort plus de chez lui depuis deux ans. Il découvre les joies d’internet grâce à Alex, un jeune homme embauché par sa fille pour lui enseigner les rudiments de l’informatique. Sur un site de rencontre, une ravissante jeune femme, Flora63, séduite par le romantisme de Pierre, lui propose un premier rendezvous. Amoureux, Pierre revit. Mais sur son profil il a mis une photo d’Alex et non la sienne. Pierre doit alors convaincre le jeune homme de rencontrer Flora à sa place.




Découvrez l'entretien avec Pierre Richard :


Quand un réalisateur écrit pour vous, on peut imaginer que cela vous fait plaisir…

Oui, bien sûr ! Avec toujours quand même, au cœur, cette petite appréhension d’être déçu par le texte et, en devant le refuser, de faire de la peine à son auteur. Un désagrément qui m’est, heureusement, rarement arrivé ! (rire). En tous cas, je n’ai pas eu cette crainte quand Stéphane Robelin m’a appelé. Je l’avais connu sur son film ET SI ON VIVAIT TOUS ENSEMBLE ?, dans lequel il m’avait confié un rôle. J’avais adoré son univers et il avait aimé ma façon de jouer. Un soir, on s’était dit qu’on aimerait retravailler ensemble. Il m’avait alors promis qu’il m’écrirait, un jour, un rôle sur mesure. J’ai dû patienter un peu, puisque c’était en 2011, mais c’est arrivé. J’ai été fou de joie.



Dans le film, votre personnage s’appelle Pierre. À part le prénom, partagez-vous quelque chose avec lui ?


Mis à part son âge (rire), rien. Ce que je peux dire, c’est que son histoire m’a beaucoup touché, parce qu’elle est celle d’un homme devenu inadapté au monde depuis la disparition de sa femme tant aimée, et à qui, contre toute attente, il va arriver des aventures. Comme avant moi Tati ou Buster Keaton, j’ai toujours eu un faible pour les rôles d’inadaptés. D’ailleurs, si on y réfléchit bien, au cinéma, tous mes personnages l’ont été, avec une belle constance !

Ce qui les a différenciés, ce sont les symptômes de cette particularité, la distraction, la maladresse, ou la naïveté ou parfois, pour les plus «décalés », les trois à la fois ! Évidemment, au fil du temps, ces personnages ont évolué. Ils ne cavalent plus sur les toits, ne sautent plus de très haut sur des bottes de foin, ne dévalent plus les escaliers, mais ils ont toujours un côté Pierrot lunaire, tendre, et pas très doué pour se défendre contre les aléas de la vie.


Quand UN PROFIL POUR DEUX commence, Pierre est exactement comme cela. Il est dans les nuages, indifférent aux plaisirs de la vie et hermétique aux outils de communication du monde d’aujourd’hui, cloîtré qu’il est, depuis son veuvage, dans la tristesse et dans la nostalgie.


Ce qui m’a amusé, c’est sa métamorphose ! Un vieux ronchon « déconnecté » qui va se transformer en homme de nouveau traversé par le désir, la vie, la gaieté et l’envie d’aventures, et cela, grâce à un gamin d’à peine trente ans et à une petite machine nommée « ordinateur »… J’ai ri, à la première lecture du scénario, ce qui, à part quelques exceptions comme LA CHÈVRE et LE JOUET, m’était rarement arrivé. Les dialogues étaient si savoureux que, j’ai eu hâte d’être sur le plateau pour m’y confronter… Et puis, jouer les amoureux… Pour l’octogénaire que je suis !… Je trouvais la perspective superbe ! 




Internet qui sert d’intermédiaire dans une histoire d’amour… cela vous a-t-il paru un peu « incongru» ?


C’est devenu très courant. Aujourd’hui, beaucoup de gens draguent grâce au web. Quand on sait s’en servir, ce qui n’est pas mon cas, le virtuel autorise toutes les audaces et toutes les projections, qu’on soit jeune, vieux, laid ou beau, timide ou entreprenant. C’est le truchement du siècle !

Et Pierre en profite. C’est une sorte de Cyrano du XXIème siècle, à ceci près que ce n’est pas son nez qui le paralyse, mais son âge… Mais, comme lui, il est un prosateur hors pair. Grâce à son verbe, il va, comme lui, séduire une jeune femme, en tomber fou amoureux, mais envoyer quelqu’un d’autre au moment de la rencontrer… Cette histoire de substitution, de vie par procuration est aussi drôle qu’attendrissante.




C’est une belle transposition contemporaine du chef-d’œuvre d’Edmond Rostand. À ceci près qu’ici, elle n’est pas tragique, mais comique, et qu’elle se termine bien. Le Pierre du film est aussi moins «pur » et donc moins poignant que le Cyrano de la pièce…

Ah oui ! C’est même, je dois le dire, un sacré enfoiré, ce Pierre, un vrai filou ! Il va manipuler son monde, sa famille et son jeune ami Alex, qu’il va embringuer dans ses péripéties amoureuses, sans le prévenir. L’innocence n’est pas son truc, à ce charmeur !

Mais on peut lui pardonner car il est sincère dans son amour, dont il pense, à juste titre sans doute, qu’il va être le dernier ! Jouer tous ces états paradoxaux a été savoureux ! Il a juste fallu que, sur la demande de Stéphane, je me modère physiquement !

Dans la vie, je suis vif, je me lève et marche plus vite que le Pierre qu’il m’avait écrit. J’ai dû me surveiller pendant tout le tournage ! (rire). Quand on vous voit à l’ecran, vous semblez être un comedien instinctif. Illusion ou réalité ? Moitié, moitié ! Pour ce film, par exemple, avant de me « jeter » avec ma spontanéité coutumière dans les prises, j’ai beaucoup répété en amont avec Yaniss.

Cela nous a fait gagner beaucoup de temps sur le tournage. On a fait au maximum quatre prises. Au lieu des vingt-cinq possibles. De toutes façons, la nouvelle économie du cinéma contraint la plupart des réalisateurs à boucler leurs films en six semaines. Les équipes, artistique et technique, doivent suivre !

Avant, les tournages duraient plus longtemps. C’était un temps béni ! Mis à part le texte que je savais toujours au rasoir, je pouvais arriver sur le plateau, riche de mon seul… tempérament… Cela me permettait d’être au plus près de ma nature ! (rire).



Vous ne connaissiez ni Fanny ni Yaniss. Comment cela s’est-il passé avec eux ?


Franchement, très bien. Fanny est aussi délicieuse qu’émouvante. Si dans la scène où elle pleure, les larmes me viennent aussi aux yeux, c’est parce qu’elle a su me porter à ce degré là d’émotion. C’est une comédienne d’une très grande sensibilité.


Quant à Yaniss, c’est un compagnon de jeu formidable. Il est à la fois simple et sincère. Son jeu est minimaliste. J’étais content de faire tandem avec lui. Le tournage s’est d’autant mieux passé qu’on était dirigés par Stéphane Robelin.


Comme Yves Robert, Francis Veber et quelques autres, Stéphane est un très bon directeur d’acteurs, ce qui n’est pas donné à tous les réalisateurs, pour lesquels, souvent, dans les comédies, le rythme prime sur le jeu ! En plus il aime les belles lumières. Sur les images, avec lui, mes yeux sont toujours bleus ! (rire) Vous semblez très heureux d’avoir tourné cette comédie… J’aime ce film. Je trouve sa réalisation très soignée et son écriture bien tenue. Il comporte de la cocasserie, mais rien n’y est gratuit, et surtout pas les situations comiques. Il est tendre aussi, tout le monde ment, mais pour ne pas mettre ses rêves en péril. Et puis, c’est un film optimiste, porteur d’espoir, pour les personnes âgées évidemment, mais pas seulement.


C’est un film « trans-générationnel », qui dit que l’amour peut survenir à toutes les époques de la vie. UN PROFIL POUR DEUX m’a ramené à cette phrase de Jacques Brel, que j’ai faite mienne : « Ah ! ce qu’il faut de talent pour ne pas mourir adulte ».



Êtes vous surpris par la longévité de l’amour du public pour vous ?


Oui, bien sûr, et ça me touche infiniment. Je crois que j’ai la chance d’avoir été aimé, jeune, par des gens qui, au fil des années, ont transmis cet amour à leurs enfants, qui, eux-mêmes…


C’est comme une longue chaîne qui aurait traversé les générations. Ce crédit auprès du public m’étonne encore. Que je sois en France, en Suisse, en Belgique ou en Russie, on essaie toujours de me faciliter la vie. Quand les flics m’arrêtent, ils rigolent et j’échappe aux contraventions.

Quand j’arrive dans un restaurant, même s’il est bondé, on me trouve toujours de la place, etc… C’est indécent, mais c’est comme ça, (rire) et j’aurais mauvaise grâce à m’en plaindre ! En ce moment, vous êtes en tournée au théâtre avec « le petit éloge de la nuit », qui est un spectacle poétique construit autour de textes sur la nuit, vous avez terminé le tournage du film LE PETIT SPIROU.



Allez vous vous résoudre à prendre un peu de repos ?


Ce n’est pas prévu. De toutes façons, le farniente, très peu pour moi ! (rire) J’ai tellement de plaisir à tourner que, pour moi, ça équivaut à des vacances. Ca tombe bien ! J’ai trois comédies au feu. Mais comme elles ne sont pas signées, par superstition, je ne vous en dirai rien. 


"Un profil pour deux", le dernier film de Pierre Richard tournée en Brabant wallon.
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